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Les prisonniers sont d'abord acheminés
vers des camps de transit. Après la
fouille, la confiscation des papiers, la douche et la désinfection,
chaque homme se fait photographier et reçoit un matricule gravé
sur une plaquette en zinc qu'il est tenu de porter en collier jour et
nuit. Les captifs sont ensuite dispersés dans des camps de travail
répartis dans toute l'Allemagne. Un stalag héberge plusieurs
centaines d'hommes dans des baraquements entourés de barbelés.
Une chambrée comprend une douzaine de lits de trois étages.
Le règlement est strict : lever à quatre heures, rassemblement,
appel, départ au travail, coucher à sept heures après
la soupe. Les journées de travail sont harassantes.
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Les commandos de travail composés
de quelques dizaines d'hommes se rendent, sous escorte sur les différents
chantiers : terrassements, entretien des voies ferrées et des routes,
corvées diverses effectuées par tous les temps et sous la férule
des contremaîtres. Conformément à la Convention de
Genève, les prisonniers de guerre sont astreints au travail
forcé à l'exception des officiers. En contrepartie, ils
bénéficient de certains droits. Les patrons allemands apprécient
la main d'oeuvre française, notamment agricole. Du fait que beaucoup de Français sont des ruraux,
ils sont souvent affectés dans des petites fermes, qui sont souvent
trop éloignées du stalag pour que les ouvriers puissent
rentrer au camp tous les soirs.
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La nourriture est l'obsession des prisonniers.
Ils souffrent de faim et de malnutrition. Certains qui ont été
pris au début de l'offensive allemande sont restés douze
jours sans manger autre chose que des herbes sauvages. Les rations sont
toujours insuffisantes, et les prisonniers affectés à la
corvée de soupe ou dans les commandos agricoles sont très
enviés. Les grands moments de la journée sont la gamelle
du midi et le casse-croûte du soir. On fait la queue devant la soupe,
la gamelle à la main, sous la surveillance des policiers à
l'affût des resquilleurs. Le menu est immuable : nouilles aux pruneaux,
rutabagas, blé cuit. La soupe du dimanche se compose de pommes
de terre avec, les premiers mois, un peu de viande. La ration de pain
est de 350 grammes par jour.
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Le moral des prisonniers est variable
: il dépend des circonstances, qui évoluent au cours de
la guerre, et des individus, qui supportent plus ou moins bien les épreuves
de la captivité. Certains broient du noir à longueur de
temps, tandis que d'autres, de naturel insouciant et jovial, savent
profiter des rares moments de pause et de loisirs. Dans cette promiscuité
de tous les instants, chacun s'efforce de préserver une parcelle
d'intimité. On ne partage qu'avec ses plus proches compagnons
ses soucis, ses souvenirs, ses colis. On garde pour soi ses photos,
ses lettres, ses bibelots. |
La population allemande ne manifeste
généralement pas d'hostilité à l'égard
des prisonniers, qui partagent ses souffrances jusqu'au bout. Tout contact avec
les civils est bien entendu interdit, et tout prisonnier convaincu de
relation avec une femme allemande est passible de la peine de mort. Il
se trouve, malgré tout, des gens assez cordiaux pour adoucir le
sort des captifs par un geste de compassion, et certains prisonniers tenteront de s'opposer aux exactions des soldats soviétiques en Prusse Orientale. Les geôliers
sont souvent des anciens combattants de l'autre guerre. Ils considèrent les soldats
vaincus avec une certaine compréhension. Ils sont secondés
dans leur tâche par des adjudants et sous-oficiers français
d'active, commis d'office, responsables de baraque, de chambrée
ou de commando.
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Les derniers mois de la guerre sont les plus durs. Les bombardements s'intensifient
et les prisonniers sont très exposés. Ils participent au
déblaiement des gravats après le passage
des avions, comme le feront bientôt les femmes allemandes. À partir de 1942, 40 000 prisonniers périssent dans les bombardements des villes. En 1945, au fur et à mesure que les Alliés avancent, les rescapés rentrent par
petits groupes .
À la gare du Nord, on leur distribue des habits civils, des papiers provisoires
et un peu d'argent. Ils sont déçus
par la froideur de l'accueil, exaspérés
par les pénuries, déboussolés et
amers. La guerre a été gagnée sans eux, la France
a été sauvée sans eux. On ne se gêne pas pour
le leur rappeler. Ils ont été les figurants de la défaite.
Ils sont les oubliés de la victoire.
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